Si Robert Silverberg est l'un des meilleurs écrivains de S-F américains, c'est parce qu'il a apporté quelque chose de neuf au genre, un élément qui avant lui était la plupart du temps passé par pertes et profits. La justesse psychologique. La compassion. La vérité. Bref : le personnage.
La planète Terre en l'an 2381 : la population humaine compte désormais plus de 75 milliards d'individus, entassés dans de gigantesques immeubles de plusieurs milliers d'étages. Dans ces monades, véritables villes verticales entièrement autosuffisantes, tout est recyclé, rien ne manque. Seule la nourriture vient de l'extérieur. Ainsi, l'humanité a trouvé le bonheur. Des bas étages surpeuplés et pauvres aux étages supérieurs réservés aux dirigeants, tous ne vivent que dans un but : croître et se multiplier. Plus de tabous, plus de vie privée, plus d'intimité. Chacun appartient à tout le monde. La jalousie et le manque n'existent plus. Contentez-vous d'être heureux. La monade travaille pour vous et maîtrise tout. Quand à ceux qui n'acceptent pas le système, les anomos, ils seront eux aussi recyclés. Pour le bien-être du plus grand nombre... L'utopie futuriste est une entreprise délicate, tant ce genre compte de chefs-d'œuvre indépassables, souvent fondateurs de la science-fiction. Loin de recycler de vieilles idées, Silverberg (Le château de Lord Valentin, les Chroniques de Majipoor) en renouvelle le genre avec intelligence et subtilité. Un grand classique à ranger aux côtés de 1984 d'Orwell ou du Meilleur des mondes de Huxley.