Auteur(s) :
Scénario : Zidrou
Dessin : Berthet, Philippe
Couleurs : David D.
Éditeur : Dargaud
Collection : Ligne noire
Date(s) de parution : 2015
Austra[s]lie, Nouvelle-Galles du Sud, 1970. À Dubbo City, la chaleur de la nuit est aussi poisseuse que les souvenirs et les rancœurs. Accusé du meurtre de sa femme Lee, une jolie blonde aussi chaude que les nuits urbaines, Greg, condamné à être innocent, revient dans sa ville natale après vingt-sept ans de cavale. Avant d'être emporté par un cancer, son frère Ikke a balancé son grand secret : c'est lui qui a tué Lee.
Mais la vérité n'est pas toujours là où on l'attend...
Berthet et Zidrou : un mariage sanglant !
1970, au fin fond du bush australien. Un berger qui vit à l’écart des hommes apprend que son frère vient de rendre l’âme. Mais l’extrême-onction du pasteur s’est changée en confession. Le frangin a avoué le meurtre de sa belle-sœur, 27 ans plus tôt, dont notre berger a été accusé, accusation qu’il l’amènera à vivre loin des hommes, au milieu des moutons. Tout semble s’éclaircir et l’heure est venue de retourner dans la ville du drame, pour aller y chercher la Rédemption. Pourtant, tout ne sera pas aussi simple.
Il y a deux façons d’écrire un polar : soit on respecte à la lettre les règles du genre, soit on joue avec, malgré le risque que cela représente. Zidrou, omniprésent dans l’actualité de ce début d’automne 2015, suit cette seconde voie, dangereuse. Il reprend les grands ressorts du récit policier, mais les renverse : le nom de l’assassin est révélé dès le début et la scène du crime est dévoilée à la fin ; la victime est omniprésente tandis que le shérif n’investigue pas. Pourtant, tout se tient dans ce récit qui tourne autour d’une jeune femme nymphomane. Mais tout se tient dans le mensonge et les apparences. Les personnages sont manipulés, le lecteur aussi.
Très bien porté par la ligne claire de Philippe Berthet (l’excellent La Route de Selma), qui soutient l’atmosphère pesante du récit, cet album reprend avec bonheur des éléments du roman noir : aucun manichéisme simpliste, tous les personnages portent leur croix et suivent leur propre quête dans une ambiance glauque. Mais la narration fait penser aussi à l’œuvre d’Agatha Christie, dans laquelle le pacte qui lie classiquement le narrateur, le personnage et le lecteur est rompu, ultime mise en œuvre du mensonge.
Ce pourrait être une relecture de l’histoire d’Abel et Caïn, mais aussi une satire sociale, ou bien une dénonciation du poids des apparences ou, enfin, un jeu narratif. Le Crime qui est le tien est tout cela à la fois. Pari risqué, mais pari gag