Si, comme l'écrit Tolstoï, chaque famille malheureuse l'est à sa manière, celle de Pietro a sa façon bien à elle de l'être, faite de non-dits qui se transmettent de génération en génération. Mario, le grand-père de Pietro, a fait la guerre sur le front russe et en est rentré si traumatisé qu'il n'a plus jamais réussi à vivre une vie normale, finissant ses jours dans une institution spécialisée. Sa fille Giovanna, la mère de Pietro, qui a reçu cette souffrance en héritage, s'en arrange sur un mode excentrique, se levant en pleine nuit pour cuisiner de bons petits plats. Pietro, lui, demande aux élèves de l'école primaire où il enseigne d'enregistrer les bruits de chez eux afin de les commenter en classe, et finit par découvrir que si sa compagne Sara et lui n'arrivent pas à avoir d'enfant, c'est parce qu'il ne «fonctionne pas correctement», puisque Sara tombe enceinte d'un autre après leur séparation. Pour sortir de cette spirale, il entreprend alors un long voyage vers les rives du Don, dans les steppes du sud de la Russie, sur les traces de Mario, sans trop savoir ce qu'il y cherche mais bien décidé à se trouver lui-même.
Habité par le souffle de l'histoire, mais aussi par les joies et les douleurs d'une famille, Toutes les familles est le «roman russe», fort et poignant, de Bajani, couronné en Italie par le prestigieux Premio Bagutta, au palmarès duquel on trouve avant lui Gadda, Calvino, Bassani et Sciascia.