Une victime et une quinzaine de témoins à la barre. La victime est morte assassinée. Cosmo était comédien célèbre, Berrichon né durant la Seconde Guerre mondiale, retrouvé trépassé à l'arme blanche. Les témoins sont presque autant de suspects : Fiona, Franck, Elke (maîtresse de Cosmo), Josette, Sandrine, un expert psychiatre...
Des êtres ordinaires auxquels s'ajoutent même le personnage de Don Juan et la romancière qui n'hésite pas à intervenir, prendre parti...
Tous vont révéler ce qu'ils savent de Cosmo. Nulle vérité mais des points de vue, qui se croisent, se contredisent ou se renforcent, dans un discours étendu sur 13 journées dans un petit village français.
Les révélations en disent autant sur la victime que sur les personnages eux-mêmes. Pourtant, qui dit assassinat dit assassin. Il faudra bien trouver le coupable. Quitte à faire témoigner une glycine, un cèdre du Liban ou un couteau !
Les précédents romans de Nancy Huston s'articulaient autour des rapports amoureux. Celui-ci, plus fouillé, plus foisonnant, ne manque pas d'hymen, ni de jalousie, ni de passion, ni de haine ou de fascination.
Roman à plusieurs voix, déroulé en petits monologues, avancé de bonds en ricochets, d'échos en résonances sur le thème du double, Une adoration est un jeu drôle et cinglant (on se croirait parfois au stand de tir) sur l'être et le paraître, le réel et l'imaginaire.
À l'évidence, l'auteur a voulu jouer sur le fil de l'écriture, s'amuser de mises en abîme. "L'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre", disait Boris Vian de L'Écume des jours. Nancy Huston a suivi la voie. C'est jubilatoire. --Céline Darner