L'obsession de l'« espace vital » est inséparable, chez Hitler, du délire antisémite. À l'étroit dans ses frontières de 1919, le peuple allemand doit, selon lui, prendre le contrôle de toutes les contrées peu ou prou « germaniques », les « libérer », ainsi que le Reich, de leurs Juifs, y asservir ou y massacrer les Slaves qui s'y trouvent, enfin y implanter des paysans dont le «sang » n'est pas douteux. Au nom de cette double utopie, raciale et spatiale, l'Allemagne a engagé à l'Est pas moins de 12 millions d'hommes. Outre les millions de victimes des combats, plus de 18 millions de civils polonais et soviétiques, dont plus de 4 millions de Juifs, ont péri. À côté des victimes « ordinaires » des combats, il y eut la mort de millions de prisonniers russes, des massacres de masse « par balles », les camps d'extermination des Juifs (tous se trouvaient à l'Est), l'incendie de milliers de villes et de villages. C'est bien en Europe orientale que la barbarie nazie a atteint son paroxysme. Plusieurs générations d'historiens, en particulier des Allemands nés après guerre, ont accumulé les travaux savants sur cette question, mais il n'existait pas encore làdessus de synthèse solide en langue française. Christian Baechler, l'un de nos meilleurs spécialistes donne ici un livre magistral.