Face à d'autres nations puisant leur légitimité dans le tourbillon des siècles, la Belgique apparaît comme un état jeune. Pourtant, la Belgique ne détient pas la palme du cadet de l'Europe : l'Italie a fêté son cent cinquantième anniversaire en 2011 et l'Allemagne moderne a été proclamée en 1871 dans la galerie des Glaces de Versailles, au lendemain du désastre français de Sedan. L'ambiguïté historique de la Belgique ne tient donc pas seulement à la relative brièveté de son existence sous la forme d'une nation indépendante. On lui reproche une double nationalité qui regrouperait de manière artificielle une population d'origine germanique (les Flamands) au Nord et une autre population d'origine latine (les Wallons) au Sud. Mais elle n'est pas le seul pays d'Europe à parler plusieurs langues. Qu'elle fût espagnole, autrichienne, française, hollandaise ou belge, la Belgique a toujours recouvert des réalités territoriales plus ou moins identiques. Le pays actuel est le résultat d'une longue histoire, faite de conquêtes et de revers, depuis l'occupation romaine jusqu'à la Belgique autrichienne, en passant par les duchés et les dynasties qui se succédèrent avant la Belgique espagnole du siècle d'or. En 1830, la nation indépendante est née d'une révolution aux accents romantiques. Elle n'en finit pas de vivre le traumatisme d'un interminable divorce, entrecoupé de quelques retours de flamme et de sursauts belgicains. Mais si la Belgique connaît aujourd'hui la situation de nombreux états européens en proie aux poussées séparatistes, elle concentre en regard les défis que l'Europe rencontre aujourd'hui : comment respecter les identités locales dans un ensemble supranational ? Quelle place pour l'ancien état nation, coincé entre des revendications régionales et des aspirations européennes ? Incarnation de l'Europe et de ses divisions, elle a été le principal champ de bataille des deux guerres mondiales.