1801, Un homme, né dans un port de Macédoine, petit négociant en tabac, ne sachant ni lire ni écrire, débarque dans la vallée du Nil. Se hissant à la tête de l'Egypte, il devient en quatre ans, quelque trente siècles après Ramsès II, le dernier pharaon. Maître absolu, il réalise l'impossible, arrache le pays aux ténèbres, crée un empire qui s'étend du golfe Persique au désert de Libye, du Soudan à la Méditerranée, soit dix fois la France - la moitié de l'Europe -, se rapprochant ainsi des nues où trône son idole : Napoléon Bonaparte. D'une terre sans forêts, il tire une marine. Il fonde des écoles, des hôpitaux, un arsenal, des industries, une armée - la plus puissante de tout l'Orient -, importe les premières machines à vapeur, dote l'Egypte de plus de cent soixante kilomètres de canaux, d'un télégraphe aérien, fait planter plus de cent mille pieds d'oliviers et dix millions de mûriers aux frontières du désert. Et tout cela, il l'accomplit avec la France et grâce aux Français. On peut dire alors que l'Egypte de Méhémet-Ali n'est pas loin d'être une province française. A l'apogée d'un règne de près de cinquante ans, il aura fondé Khartoum, conquis l'Arabie et la Syrie, sera parvenu jusqu'aux portes d'Istanbul, aura fait trembler sur ses bases le vieil Empire ottoman... L'Europe entière est debout. C'est ce dernier pharaon - celui à qui la France doit l'obélisque de la Concorde - que Gilbert Sinoué fait revivre sous nos yeux. Il le fait, avec l'extrême rigueur de l'historien et le grand talent de conteur qu'on lui sait.