À Hollywood, les films d'action sont simples : il y a les gentils d'un côté et les méchants de l'autre. À Washington, et surtout depuis le 11 septembre 2001, c'est un peu la même chose. La "guerre contre le Mal" est à nos portes et les pays occidentaux jouent la valse-hésitation entre hégémonie américaine et paix à préserver. Or, évidemment, la réalité géopolitique est un peu plus complexe qu'un scénario de série B. C'est ce que nous prouve une fois de plus l'enquête d'Éric Laurent, grand reporter et spécialiste du Moyen-Orient. Laurent s'est intéressé de près aux affaires de la famille Bush en partant de l'exemple du grand-père et de ses amitiés allemandes dont la devise fut : "Avant de vous lancer dans la politique, commencez par réussir dans les affaires. Vos futurs électeurs seront alors convaincus que vous êtes compétents et désintéressés, attachés à l'intérêt général." Devise suivie plus ou moins brillamment par son fils et petit-fils dont les affaires les ont menés du côté de l'Irak, de l'Arabie saoudite et de la famille Ben Laden, bien avant que celle-ci ne devienne l'ennemi à abattre dans la tête du petit dernier devenu président des États-Unis.
L'auteur nous présente aussi l'entourage de Bush, peuplé de financiers bienveillants et particulièrement conciliants. Il revient, évidemment, sur la première guerre du Golfe de Bush père, et nous éclaire sur celle que nous prépare Bush fils. Avec, en filigrane, la preuve que l'argent n'a pas d'odeur, n'en a jamais eu. Mais, à la lecture de cette étonnante enquête où l'on apprend que la famille Bush et son entourage fidèle ont armé Saddam Hussein avant de décider de lui faire la guerre, on est surpris par la complexité des rapports industriels et politiques des Américains avec les Irakiens. Et on arrive à des certitudes qui font froid dans le dos : oui, il semblerait que la CIA, du temps du conflit Iran-Irak, ait fourni aux Irakiens des renseignements pour "mieux calibrer leurs attaques aux gaz moutarde" contre les Iraniens. Oui, George Bush aida beaucoup Bagdad, et ce dès 1984, allant même jusqu'à intervenir lui-même pour que l'Irak trouve les crédits qui lui manquent. Oui, la famille Ben Laden et la famille Bush ont, qu'elles le veuillent ou non, des relations et des intérêts communs.