La vie et l'œuvre de Germaine de Staël sont placées sous le double signe de l'empire du cœur et du pouvoir de la raison, à la jointure de la philosophie des Lumières et du romantisme naissant. Tous deux convergent vers une passion raisonnée, celle de la liberté. C'est à la conquérir que Mme de Staël a employé une énergie débordante, une intelligence acérée et un immense talent d'expression. Liberté dans les institutions que la France, entre la fin de l'Ancien régime et le début de la Restauration, a expérimentées sans savoir s'y arrêter ; liberté de l'esprit, dont la critique doit s'exercer sans craindre les préjugés ni les modes ; liberté de la femme, dont le statut et les mœurs sont à affranchir des contraintes sociales. En littérature, en philosophie politique, en histoire, Mme de Staël, plus de vingt ans durant, a progressivement battu la mesure et donné le ton à toute l'Europe éclairée, au point d'apparaître comme la principale " rivale " de Napoléon. Au développement du libéralisme, son apport fut déterminant.
Les quatre ouvrages ici publiés s'étalent de 1796 à 1817. Le premier fut publié au début du Directoire, le dernier au tournant de l'Empire et de la Restauration. Ils témoignent de l'engagement de leur auteur dans des débats dont les termes demeurent actuels : comment l'homme peut-il trouver les voies du bonheur au sein de la société ? Existe-t-il un équilibre entre démocratie et aristocratie, entre violence et justice, entre expression de la volonté populaire et gouvernement des meilleurs ? Jusqu'où peut conduire une révolution ? La réflexion philosophique et l'analyse de situations concrètes se mêlent ici à un art de la description et du portrait qui ne dissimulent pas toujours le bouillonnement des sentiments. Germaine de Staël n'a cessé de travailler, en faveur des peuples et des individus, à l'avènement de toutes les libertés, combat incessant dont elle fut l'une des pionnières et reste une des meilleures références.