Selon Nádas lui-même, dans un entretien de 2005, Almanach représente un arrêt dans la mise en chantier d'Histoires parallèles, juste après avoir achevé Le Livre des mémoires car, dit-il, « en 1987 et 1988, j'avais l'impression que l'écriture de romans ne rimait plus à rien. Dans la rue, les événements politiques s'enchaînaient à une vitesse incroyable, tout y était plus précis et plus digne d'intérêt que dans la fiction ».
Seul livre à ce jour où l'auteur pratique ouvertement l'autobiographie dans une manière de journal écrit mois après mois, Almanach n'est ni le prétexte à des épanchements nombrilistes, ni un instrument d'auto-glorification : « Je ne voulais pas ennoblir le temps de ma vie à l'aide de genres littéraires. » Le livre ne se présente d'ailleurs pas du tout comme un journal intime, plutôt comme une succession de textes qui permettent à l'auteur de mêler les genres, entre essais et récits tantôt brefs, tantôt de vaste envergure, tel un kaléidoscope où affleurent tour à tour des thèmes dont la diversité reflète celle de la vie elle-même. Alors que l'auteur s'installe à la campagne, nous apprendrons avec lui comment faucher une prairie ou parcourir le paysage à la faveur de séances de footing, ou comment se dépouiller des oripeaux aliénants de la vie citadine.
Nous le suivrons aussi à Berlin, à Rome (et jusque dans un avion où il côtoie Marcello Mastroianni) ou, dans le passé, se remémorant un triangle amoureux à l'âge des émois adolescents. Et la mort reste tapie sans cesse en arrière-plan, vue sous l'angle de ceux qui restent, et au plus profond du regard de ceux qui partent, comme chez cette femme âgée, dont l'agonie occupe la fin du volume.