Elle ne sait plus. Ou plutôt, la drogue aidant, elle ne se rappelle que trop bien : le bébé rose assassiné, les bandages autour de la tête, non ce n'était pas une poupée qu'elle a vue, c'est sa petite sour, et c'est son père qu'elle aimait tant qui l'a tuée, étouffée, elle le sait, à moins que ce soit sa mère. Trente ans après, elle doit la venger, il le faut.
Et il en va ainsi pour les personnages de ces dix nouvelles glaçantes. Hommes et femmes, jeunes et vieux, ils ne peuvent plus respirer. Dans l'attente désespérée d'un bonheur qu'ils ont connu et perdu, ou tant rêvé et jamais approché, ils étouffent, ils ont besoin d'air et de vengeance. Vampires exigeants, ils s'acharnent moins à sucer le sang qu'à voler le souffle de ceux qui leur ont failli. Ils veulent qu'on leur rende ce que, selon eux, on leur a pris : un cour (Donnez-moi votre cour : une femme abandonnée par son amant dans sa jeunesse, entend, vingt-trois ans plus tard le récupérer sous peine de mort,) ; une épouse (Le premier mari : un homme découvre dans un tiroir des photos de sa femme avec son premier mari : fou de jalousie, il décide de le tuer, et se jette sur lui à coups de fourche, mais le fait-il vraiment ?) ; un enfant (La Chute), une vie (Veine cave) . Et les victimes de ces prédateurs, perdant la respiration à leur tour sous les assauts de l'angoisse ou de la haine, n'ont plus qu'à tenter de ne pas sombrer dans les remugles d'un passé qu'elles croyaient à tort oublié.