On m'avait prévenue, c'est un univers très fermé. Barricadé derrière ses règles de confidentialité. Tout ce qui se dit au conseil doit rester au conseil. On m'a dissuadée de chercher. On m'a affirmé que la « caste », c'était fini. Que tout désormais n'est qu'éthique et ouverture. Et on m'a assurée qu'avec l'arrivée en leur sein de femmes, d'étrangers et même de salariés, ces hauts lieux de pouvoir n'ont plus rien à cacher.
À l'ère de la transparence tous azimuts, les conseils d'administration sont pourtant les dernières forteresses. Protégés par de hauts murs de silence, c'est là que les « premiers de cordée » se rassemblent. Ils viennent des grandes écoles, de la haute administration et même de la politique. Y nouent de fructueuses alliances avec les héritiers des grandes fortunes.
Ils se réunissent, une dizaine de fois par an, aux étages nobles de LVMH, Carrefour, Total, Orange. Et ils y décident de notre avenir. Vont-ils créer des emplois en France ou en supprimer ? Investir dans la recherche ou maximiser les profits ? Fermer des sites ou relocaliser des industries ?
Ces nomenklaturistes du XXIe siècle disent œuvrer pour le bien commun. Ont-ils rompu avec le capitalisme à la française, incestueux et dominateur ? Ou se sont-ils contentés de tout changer pour que rien ne change ?