La vie de ma chère Natalie Barney est une suite ininterrompue de grandes amours. Car la séduction, la vraie, ignore les méfaits de l'âge. Et depuis sa naissance, le 31 octobre 1876, à Dayton (Ohio), jusqu'à sa mort à Paris, le 2 février 1972, Natalie n'a pas cessé de séduire et de faire naître les oeuvres les plus diverses des passions qu'inspiraient sa beauté, son esprit, sa personnalité de femme libre en un temps où les femmes l'étaient si peu. Pour elle, Liane de Pougy écrit son roman Idylle saphique, Renée Vivien compose ses meilleurs poèmes et Romaine Brooks ses meilleurs portraits. Remy de Gourmont lui adresse ses Lettres à l'Amazone. Mais l'Amazone ne s'est pas contentée d'être une muse. Elle est l'auteur de livres de souvenirs, Souvenirs indiscrets, Traits et portraits, Aventures de l'esprit qui appartiennent à l'histoire littéraire de notre siècle, comme son salon qu'elle a tenu à Paris, au 20 rue Jacob, de 1910 à 1970, et où elle a reçu ses amis qui se nommaient Anatole France, Paul Valéry, Colette, Pierre Louys, Paul Morand, Gertrude Stein, Milosz ou Max Jacob. Le 29 juillet 1963 dans une lettre, Marguerite Yourcenar déclare à Natalie Barney : " [...] Je me suis dit que vous aviez eu la chance de vivre à une époque où la notion de plaisir restait une notion civilisatrice (elle ne l'est plus aujourd'hui). " Cette notion a marqué l'existence de l'Amazone qui, m'ayant choisi pour confident, m'avouait sereinement à l'automne 1963 : " Je crois ne m'être jamais approchée d'un être sans lui faire du bien. " Elle me répétait aussi : " Mieux vaut passer sa vie à se créer soi-même qu'à procréer. " Cette biographie en forme de témoignage apporte de multiples preuves à ces deux affirmations.