Entre 1914 et 1918, une rumeur ne cesse d'enfler et - d'occuper les civils, la scène politique et les tranchées : cherchant ou conservant des postes de tout repos à l'arrière, un grand nombre d'hommes se déroberaient au devoir des armes et aux premières lignes meurtrières. On leur donnait un nom : les «embusqués». Si les autres sociétés en guerre ne furent pas épargnées par cette question, ce fut bien en France qu'elle sembla revêtir une importance capitale, au point d'éprouver la cohésion de l'Union sacrée et de saper le moral des combattants. Face à la polémique, le pouvoir organisa donc une «chasse aux embusqués».
Les conduites d'évitement de la guerre soulignent avec force la complexité et l'ambiguïté des comportements humains dans un conflit qui exigea les épreuves que l'on sait. Surgissent alors les ressources sociales ou individuelles, les marges de manoeuvre inégales et aléatoires, ainsi que les complicités dont disposaient des citoyens mobilisés mais voulant se soustraire aux activités les plus périlleuses de la guerre.
L'ambition de cet ouvrage est d'expliquer cette rumeur oubliée et de mettre en lumière les ressorts profonds de la société française en guerre.