Emmanuel Levinas est l’un des premiers penseurs à introduire en France la phénoménologie. Nourri de la pensée d’Husserl, il construit une œuvre forte et originale. Sa thèse principale, selon laquelle "l’éthique est la philosophie première", est une critique de la pensée occidentale, et du primat que celle-ci a accordé à l’ontologie ; mais elle constitue aussi un rappel des ressources oubliées de la tradition philosophique.
Pour Levinas, la philosophie échouerait dans sa lutte contre le nihilisme, si elle ne tenait ensemble les exigences de la raison logique - qu’il faut arracher à ses tentations idéalistes - et le désir de la transcendance - dont la vérité n’apparaît qu’à l’épreuve de l’existence humaine. Seul le langage qui témoigne de l’autre et pour l’autre s’élève à une inspiration "au-delà de l’essence".
Thèse difficile, dont l’auteur s’efforce ici de suivre au plus près les arguments, pour en faire apparaître la forte cohérence, depuis les premiers articles (De l’évasion) jusqu’aux derniers grands recueils (De Dieu qui vient à l’idée). Ce parcours, qui emprunte les voies de la phénoménologie, impose surtout d’entrer dans une expérience philosophique d’une intensité peu commune, que cristallise singulièrement la notion de "visage". Enfin, des présentations thématiques sont consacrées à la pensée de l’art, de la politique, de la religion. Les étudiants en philosophie et un large public cultivé trouveront ici une introduction à l’ensemble de la pensée de Levinas, une pensée devenue indispensable à la philosophie, au dialogue des religions, à l’éthique contemporaine de la vulnérabilité, aux théories de la vie sociale.