« Crac, voici l'histoire. Vraie ou fausse, qui le sait ? Mais comme c'est une vieille histoire, il faut que tu l'écoutes en croyant qu'elle est vraie, même si elle est fausse. D'accord ? - Oui ! » Il était une fois un village au fond d'une vallée, dans l'île de Shikoku. C'est là que jadis se sont rassemblés des fuyards, bannis hors de la ville du château. Ils ont fondé, après un long périple, une société autonome de rebelles. La forêt les entoure et, dans la forêt, des forces mystérieuses : les « merveilles ». Une rivière capable de détruire une armée entière. Un déluge qui dévaste la terre. Un chef, surnommé le « destructeur », des jeunes femmes appelées les filles de l'île des « pirates », des villageois qui ressemblent aux démons de l'enfer bouddhiste, une géante, des vieillards qui ne savent plus s'ils vivent un rêve ou rêvent leur vie et qui disparaissent dans les nuées au clair de lune et un enfant qui est né avec une malformation qui semble la marque fatale des « merveilles de la forêt ». Dans ce roman complexe et magique, Kenzaburô Ôé prend le ton d'un conteur. Il nous raconte, dans un style envoûtant, l'histoire mythique de son village natal, telle que la psalmodiait sa grand-mère. À travers les légendes et les anecdotes venues de son enfance, il tente de tisser le fin réseau de l'histoire et du rêve, autour de ce signe mystérieux : M/T. La nostalgie émerveillée est ici accompagnée d'une réflexion brillante sur la structure des révoltes, sur les sociétés autarciques et sur les mythologies régionales. Et surtout, l'auteur du Jeu du siècle offfre à son fils, Hikari, qui est, depuis longtemps, le centre de son œuvre, un bouleversant témoignage d'amour.