"La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre" (Yves Lacoste).
La géographie a toujours été une préoccupation des princes et des stratèges. La connaissance de l'environnement physique, des itinéraires, des ressources, des cités fortifiées, des populations à administrer, notamment, est en effet un des fondements des conquêtes et de la gouvernance territoriale : c'est chose entendue depuis l'Antiquité – Sun Tzu, en particulier, y consacre de longs développements dans L'Art de la guerre et Jules César, dans La Guerre des Gaules, atteste de l'exploitation tactique du terrain dans la manœuvre. Il a fallu cependant attendre le xixe siècle pour rationaliser les éléments de connaissances géographiques en Europe et assister à la naissance d'une géographie purement militaire : elle devient, parmi d'autres, un moyen de lutter contre l'occupation de territoires par les armées napoléoniennes.
Engagements militaires sur plusieurs théâtres d'opérations, sécurisation du territoire national face à la menace terroriste, bouleversements géopolitiques et géostratégiques régionaux, cartographies des infections, des virus et des bactéries, gestion des catastrophes naturelles, appui à la connaissance des zones à reconstruire, connaissance des cultures locales... Aujourd'hui au cœur de la révolution numérique et cartographique, et forte de nouveaux outils de haute technologie – comme les satellites de navigation permettant la géolocalisation en temps réel –, la géographie militaire connaît de profondes mutations.
Philippe Boulanger analyse ces changements avec maestria et nous guide dans ces territoires peu connus de l'historien, revenant sur l'invention de cette géographie spécifique, sur ses liens avec les opérations militaires et sur son avenir.