Le sucre a ceci de particulier que son usage et sa représentation varièrent beaucoup avec le temps. Remède, épice, puis aliment, le sucre deviendra ce produit de première nécessité que les familles aimeront à entasser en prévision de crises. Mais comme l'a relevé Claude Fischler dans L'Homnivore, « depuis son apparition en Occident, le sucre a été alternativement angélisé ou diabolisé ». Ses détracteurs l'ont accusé de bien des maux, jusqu'au tour nouveau que la « saccharophobie » a pris dans la seconde moitié du XXe siècle au nom de la santé. À un moment où, dans les pays riches notamment, la « sagesse des corps » était brouillée par le changement des conditions de vie, des physiologistes, des endocrinologues, des nutritionnistes furent invités par les autorités sanitaires à contrevenir au « libre-arbitre alimentaire » afin de conjurer les maladies de l'alimentation.
Ce livre retrace l'histoire du sucre qui fut parfois dramatique, ce qui faisait dire à Voltaire dans Candide : « C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe ». Mais le sucre a aussi une économie, un business, une géopolitique propre, impliquant de nombreux acteurs privés ou institutionnels, sur lesquels l'auteur jette un éclairage nouveau.
Mondialisée de longue date, mais en perpétuel mouvement, l'économie de cette substance, et de ses dérivés, se présente comme un système complexe, caractérisé en ses deux extrémités par des activités de production et des actes de consommation.
Ce livre explore le chemin, long et tortueux, qui mène des champs de canne et de betterave à sucre à la table des consommateurs.