Le premier des voyageurs qui ait visité l'Égypte, le premier du moins qui nous ait laissé le récit de son voyage, Hérodote d'Halicarnasse, a résumé l'impression que produisit sur lui cette contrée merveilleuse en une seule phrase, souvent citée : L'Égypte est un don du Nil[1]. L'Égypte n'est qu'une bande de terre végétale tendue à travers le désert, une oasis allongée aux bords de la rivière et sans cesse approvisionnée par elle de l'humidité nécessaire à la végétation. Il faut l'avoir vue au moment de l'étiage, un mois avant le solstice d'été, pour se figurer ce qu'elle deviendrait Si quelque accident la privait de son fleuve nourricier. Le Nil s'est resserré entre ses rives au point d'être réduit à la moitié de sa largeur habituelle, et ses eaux troublées, limoneuses, stagnantes, semblent à peine couler dans une direction quelconque. Des bancs plats ou des masses abruptes d'une boue noire, cuite et recuite au soleil, forment les deux berges. Au delà, tout c'est plus que poudre et que stérilité, car c'est à peine si le khamsin, le vent chargé de sable qui dure quarante jours, a cessé de souffler.