À ceux pour qui la fin d'une civilisation n'est pas la fin du monde. À ceux qui voient l'insurrection comme une brèche, d'abord, dans le règne organisé de la bêtise, du mensonge et de la confusion. À ceux qui devinent, derrière l'épais brouillard de "la crise", un théâtre d'opérations, des manoeuvres, des stratégies -et donc la possibilité d'une contre-attaque. À ceux qui portent des coups. À ceux qui guettent le moment propice. À ceux qui cherchent des complices. À ceux qui désertent. À ceux qui tiennent bon. À ceux qui s'organisent. À ceux qui veulent construire une force révolutionnaire, révolutionnaire parce que sensible. Cette modeste contribution à l'intelligence de ce temps.Comité invisible.
En 2007, L'Insurrection qui vient esquissait la critique sombre d'un monde en décomposition. À nos amis rayonne de joie. Celle des insurrections finalement survenues au Caire, Athènes, Madrid, Istanbul ou dans le val de Suse. Le Comité invisible y voit un même mouvement dont la défaite trace la voie : élaborer une "perception partagée de la situation" et "nous organiser, mondialement". Puisque le pouvoir réside désormais dans les infrastructures et les flux, il se combat par le blocage, qui interrompt les circulations mais engendre une vie commune auto-organisée. À une gauche sinistre, les auteurs opposent l'enthousiasme : "Penser, attaquer, construire -telle est la ligne fabuleuse" ; on se regroupe en communes pour nouer les liens affectifs, collectifs, concrets, territorialisés qui révèlent l'inutilité de tout gouvernement. L'insurrection passerait ainsi par la découverte d'un rapport vrai au monde. Des esprits chagrins objecteront qu'une stratégie fondée sur la seule opposition entre le pouvoir et les populations néglige le poids des antagonismes sociaux : on a raison de se révolter, mais pour quelle révolution ? Pierre Rimbert (monde-diplomatique.fr)