Aurélien Delamare débarque à Villerville pour régler la vente de la maison familiale. Il est censé ne passer qu'une nuit en Normandie. Mais son séjour se prolonge et prend l'allure d'un état des lieux personnel. Face aux fantômes de l'adolescence, Aurélien interroge son histoire jusqu'à sonder les racines d'une solitude à la fois subie et choisie. Maintenant qu'il est revenu en presque étranger dans son village natal, la question se pose autrement : s'agit-il de retrouver quiconque ou de rencontrer enfin quelqu'un ? Je ne retrouve personne est un livre d'abandon au principe d'incertitude.
Extrait :
"Mais, à bien y réfléchir, comment la contemplation de l'enfance pure ne nous serait-elle pas insupportable à certains moments ? C'est à s'en donner l'air niaiseux (celui-là même que j'ai diagnostiqué sur la gueule de tant de parents) : lire, en filigrane du bonheur juvénile, la perspective de ce que l'on nomme couramment « la perte de l'innocence » (ce qui ne veut rien dire, même s'il y a un fond d'intuition dans la formule) ; disons plutôt : la dégradation d'une possibilité de vie et de joie. Oui, voilà ce qui m'apparaissait : l'idée que la possibilité de vie et de joie de Michelle puisse aller en se dégradant, et combien tout sera tellement moins facile plus tard, dépourvu de cet allant sans réserve qui jaillit pour le moment comme une force naturelle. Bien sûr il y aura quelques merveilles mais le bonheur ne sera que conquis, intermittent, fastidieux : ce sera un curieux labeur. J'observais Michelle au-dessus de ma tête et je me disais : il restera bien quelque chose de tout ça mais dilué, affadi, tout juste rattrapé par l'effort d'une vie intérieure."
À travers le journal d'un trentenaire en crise, Arnaud Cathrine ose se perdre pour mieux surmonter un à un les pièges de la mélancolie.