L'oeuvre de Yôko Ogawa est depuis toujours composée d'une alternance de romans et de nouvelles, comme si la forme courte demeurait pour elle, au fil de son parcours, une chambre noire, et plus encore la note sensible de sa partition. Ainsi les lecteurs familiers de son univers retrouveront-ils ici les thèmes qui lui sont chers : le monde secret de transmission et de confiance que les enfants partagent avec les vieillards. Les vibrations des mélodies n'existant que par-delà le silence, l'hyperacousie des êtres fragiles, l'effacement d'un temps que seul l'amoncellement d'objets semble pouvoir réanimer. L'attirance gourmande et dangereuse pour les aliments sucrés, la présence rassurante des animaux, la mort annoncée telle une avancée paisible. Les personnages de Yôko Ogawa sont des coureurs de fond comme cette femme qui s'entraîne la nuit, trébuche et tombe. Dans cette nouvelle intitulée L'Autopsie de la girafe, une silhouette timide s'avance pour lui porter secours, une figure de silence qui dès lors ne quittera plus jamais les imaginaires d'Ogawa.