La bergère humecte la cigarette qu'elle vient de rouler. "C'est harassant, dit-elle, d'avoir le loup comme adversaire". Canis lupus est revenu. Sur l'ensemble des massifs alpins, des Pyrénées au Cantal, jusqu'en Vosges, dix-neuf meutes sauvages peuplent vingt-neuf "territoires à loups". Mais l'expansion géographique du loup se mesure surtout en milliers d'ovins tombés sous ses crocs. Symbole d'une nature reconquise pour ses partisans, cauchemar pour les gardiens de troupeaux, la réapparition du prédateur divise dans les alpages. La montagne serait-elle redevenue le lieu d'un combat ? Troupeaux et bergers devront-ils déserter, abandonner les estives au profit du sauvage, dévorateur de brebis ?
Anne Vallaeys a parcouru les confins du Mercantour, en Ubaye, où depuis toujours vivent des générations de bergers et d'éleveurs. Sur la trace des loups, jour après jour, la voyageuse a gravi les vallons, contourné les falaises et les précipices. Pour comprendre. Son récit ébranle les représentations convenues du prédateur séduisant, le loup, et de ses proies, les brebis. Il démonte les stéréotypes et les faux-semblants d'une nature "vraie" qui aurait tous les droits.