Valérie Zenatti explore ici la mémoire algérienne. Ses adolescents partis se battre dans un pays qu'ils ne connaissaient que dans les livres, ses mères sans nouvelles prêtes à faire le tour des casernes à la recherche de leurs fils, le quotidien loin du front, entre deux langues (le français et l'arabe) et deux cultures (juive et musulmane), le deuil enfin, qui résonne différemment en chacun. Un hommage à toutes ces familles algériennes, dont la guerre allait précipiter le déracinement.
Plus que sur la mémoire collective, Jacob, Jacob s'est construit sur le socle des souvenirs ou objets de famille (une photo, une carte postale...). L'imagination et l'écriture ont fait le reste. Car, ici, le pays des origines, mille fois perdu et retrouvé, c'est la langue française, bousculée, magnifiée, qui se charge de l'inventer...
Un roman étonnant de force, de chaleur, de justesse.
Le secret de cette écriture sauvage, proche de celle de Laurent Mauvignier, vient d'un grand attachement à l'enfance. Si la romancière a trouvé le ton juste pour dire la cacophonie destructrice qui peut tonner dans une cervelle d'homme en guerre, c'est qu'elle écrit à hauteur d'enfant. Avec cette lucidité impulsive, ce regard à la fois immédiat et distant, cette sensibilité aux goûts, aux formes et aux couleurs des sentiments. Et cette rage dans un écrin d'innocence.
Valérie Zenatti restitue la communauté juive d'Algérie et ses morts pour la patrie. A la croisée du réel et de l'imaginaire...
A partir de ce visage et des souvenirs de sa grand-mère Madeleine, l'auteur d'Une bouteille dans la mer de Gaza brode une superbe tapisserie, ressuscitant, par la grâce de sa langue, au rythme des mélopées arabes, la vie d'une famille juive dans l'Algérie des années 1940 et les combats éprouvants des troupes menées par le général de Lattre de Tassigny.
À travers l'itinéraire de son grand-oncle, juif d'Algérie tué au combat en 1944 dans la forêt des Vosges, Valérie Zenatti entrelace grande histoire et mémoire familiale, d'une guerre à l'autre...