Wilson déploie une rare attention à centrer son récit autour de personnages que l'on croiserait plus volontiers chez Russell Banks que chez Asimov, personnages dont le devenir n'est pas réglé sur les seules exigences de l'intrigue, dont la vie est affectée par une transformation globale à laquelle, pour autant, elle ne se résume pas. Si notre temps se distingue par le mal que nous avons, justement, à le faire nôtre, tant les perspectives écologiques fixent à notre pratique un agenda inhabituel, et tant le rapport de nos comportements individuels aux changements collectifs apparaît incertain, l'oeuvre de Wilson travaille à donner figure à cette expérience-là. Dans Axis, la planète neuve et vierge sur laquelle l'humanité a trouvé refuge se couvre déjà, sur ses franges, de bidonvilles construits à la hâte et de carcasses de navires découpées pour en extraire le métal ; l'espérance de vie, elle, s'allonge, mais la forme à donner au grand âge n'est pas encore inventée. Dans ce monde de dégradations que l'on ne peut éviter de voir mais dont on peut encore, un temps, se détourner, et face à cette durée dont on ne sait que faire, les Dieux à venir portent un nom qui sied à nos hésitations : Wilson les nomme les Hypothétiques.