Modeste employée de librairie, mère célibataire à la vie précaire, Fatima devient contre toute attente la confidente d'une vieille femme richissime qui vit recluse dans une immense maison au bord de la mer, non loin de Lisbonne. Ne commandant des livres qu'à seule fin de recevoir sa visite, Madame impose à Fatima de s'asseoir à ses côtés pendant des heures pour l'écouter raconter sa vie. Elle s'attache en particulier à se remémorer l'ascension irrésistible de son père, qui lui inspire une haine ambiguë. Ne reculant devant aucune vile manœuvre pour faire prospérer son empire industriel et financier, celui-ci aura su s'imposer comme un personnage de premier rang, recevant têtes couronnées et puissants de ce monde pour des dîners fastueux et des parties de tennis. Pendant la guerre, il fait commerce de wolfram, en louvoyant entre les Anglais et les Allemands. Il a l'oreille du dictateur (sénile), lequel facilite ses activités dans les colonies africaines. Incapable de la moindre humanité (du moins, en apparence), il consacre toute son énergie à mépriser sa fille, son épouse, ses petits-enfants, et semble entraîné dans une fuite en avant, désirant toujours plus de richesses, toujours plus de maîtresses, conquises avec la même avidité rapace, sans que son mal de vivre n'en soit aucunement atténué.