En phrases nouées comme des rivières vertes et silencieuses, qui se délitent, enflent et cheminent vers une réconciliation parfois infime, Mingarelli embrasse les mystères de la vie, délace des tragédies d'hommes humbles, tous antihéros. La nature, sauvage, aride, magnifique, prend ici des allures de mère consolatrice, comme une improbable promesse.
Extrait :
"Une souris mélancolique me regarde pendant que je fais la vaisselle. Il y a quelques jours déjà qu'elle sort du tas de bois que j'ai monté devant la fenêtre, et qu'elle me voit à travers la vitre. Elle a dû faire son nid entre les bûches, et lorsqu'elle entend l'eau de mon évier couler dehors, elle grimpe tout en haut du tas, et ses yeux gris m'évoquent la mélancolie. [...] Je n'ai personne à qui parler ici, si bien que je parle à la souris. Je ne lui dis rien d'extraordinaire. Il m'arrive de faire durer ma vaisselle, ou même, lorsqu'elle est finie, de laisser couler l'eau. Ainsi elle ne retourne pas tout de suite à l'intérieur du tas de bois. Je reste debout devant l'évier et je continue à lui parler.C'est la nuit que j'aurais besoin d'elle. J'entends le ressac, et parfois le vent. J'entends battre mon coeur et je voudrais le dire à quelqu'un. La nuit, ma peur entre dans la maison et vient s'asseoir sur mon lit. J'entends alors la mer le vent et mon coeur, et j'ai du mal à retrouver le sommeil..."