Dans un tableau célèbre de Magritte, Reproduction Interdite, un homme contemple son propre dos dans un miroir. Il s'appelle Edward James. Qui était-il ?
Anne Vallaeys est partie sur les traces de cet inconnu. Il fallait une âme de romancière pour approcher le mystère de ce chevalier errant. En quête de beauté, Edward James traversa son siècle, rêvant de poésie sous les arches de l'université d'Oxford, conviant le jeune Salvador Dali à goûter les splendeurs de la côte amalfitaine, lui soufflant au passage quelques idées folles dont l'artiste fera des œuvres fameuses. Richissime héritier, après une adolescence contrainte par les interdits de la haute société britannique, Edward choisit de se consumer au feu des artistes. Pour plaire à une danseuse volage, il commandite un ballet à Kurt Weill et Bertolt Brecht ; familier du cénacle des Noailles, mécènes de l'avant-garde, le jeune homme fréquente Chirico, Klee, Miró, Giacometti, Delvaux et Max Ernst. Il constitue une impressionnante collection de peintures. Mais, un soir de novembre 1947, il disparaît dans la jungle mexicaine. Inlassable, Anne Vallaeys finit par retrouver son fantôme à Xilitla, « le pays où naissent les escargots ». Elle franchit le miroir. Sous la canopée, Edward a édifié une ville selon ses chimères : enchevêtrement de portiques et de colonnades, palais fantasmagoriques - une architecture des songes, à l'image d'un homme qui lutta toute sa vie avec les armes de l'art contre la tyrannie du réel.