L'ouvrage posthume de Reiner Schûrmann - dont on avait pu apprécier Le principe d'anarchie. Heidegger et la question de l'agir, il y a une quinzaine d'années - , est une somme considérable, en position de testament, dont la subtilité (au bon sens du terme) ne démentira pas le risque « aristocratique » de la philosophie. Pourtant l'auteur, comme Hans Jonas, fait partie des rares Européens ayant enseigné en Amérique qui auront pris à bras le corps en « continentaux » et non à la manière « analytique » les problèmes fondamentaux de notre siècle. Aussi bien, dans le sillage de Heidegger, la prise en compte des désastres de l'ère technique appelle-t-elle une mise en perspective de notre modernité - longtemps liée à la conscience de soi - par rapport à l'Antiquité grecque (sous l'égide de l'Un) et latine (sous l'égide de la nature), qui l'aura précédée. Bien plus, « contribution à la très ancienne doctrine des principes » (p. 11). le livre cherche à dégager les hégémonies que ces principes ont exercées, en montrant comment elles ont été brisées (d'où le titre) et en les assignant topologiquement aux lieux de phénoménalité et de langage où elles se sont déployées.