Gabrielle, née dans une modeste famille du Gers, servante chez les Clapeau de Marmande, reçut « l'esprit et le génie » de la cuisine en mijotant quelques plats pour ses employeurs dans leur maison des Landes. Jeune mère sans homme - elle ne croit pas à l'amour -, elle fit ses premières armes dans un bistrot de Bordeaux et ouvrit La Bonne Heure en 1973. L'établissement conquit vite sa réputation de meilleure table de la cité girondine, gagna une étoile au Guide. Mais la fille de Gabrielle, qui détestait sa mère et sortait d'une grande école de marketing québécoise, imposa une restructuration totale du restaurant, qui perdit son étoile et ses habitués. La Cheffe disparut, au grand désespoir de l'homme qui l'aimait en vain... La cuisine vécue comme un sacerdoce est au centre du beau livre de Marie NDiaye, mais ce sont ses personnages, travaillés avec une passion mélancolique par la romancière, qui font de La Cheffe, roman d'une cuisinière, une oeuvre hors du commun source : le grand livre du mois.