Pour son premier roman, Hélène Zimmer a voulu faire le portrait d'une femme rongée par le quotidien. L'installation en couple, la naissance des enfants, les obligations financières, tous ces éléments constitutifs de la famille participent de la dégradation identitaire. Plus les statuts s'empilent, plus les couches sociales se superposent - femme, mère, vendeuse - plus l'être se disperse, perd en épaisseur.
Coralie existe pour les autres. Sa vie appartient à ses enfants, au père de ses enfants, à son patron. Elle pense avoir choisi librement ce qui l'entrave. Son histoire est celle d'un emprisonnement consenti. Au lieu d'essayer d'échapper à la servitude, Coralie cherche à maintenir le peu d'équilibre qu'il reste du système qu'elle a fabriqué autour d'elle.
Elle résiste. Elle ne renonce pas. C'est une victime pugnace et endurante. Surtout victime d'elle-même.
C'est ce paradoxe qu'Hélène Zimmer met en évidence. Quand le choix est encore possible, pourquoi subir une réalité agressive et destructrice ? Pourquoi ne pas la changer ? Pour Coralie, la vie s'est réduite à une unique et longue voie matérielle. Elle est engluée, figée dans un système qui néantise sa volonté. De cette impasse matérielle, affective, mentale, Hélène Zimmer rend compte grâce à l'incroyable efficacité d'une écriture, précise, violente, fouailleuse, de dialogues qui font mouche à tout coup, et d'un talent d'observation sociale rare.