Plus jamais ça ! " : tel était l'objectif de la notion de crime contre l'humanité, définie juridiquement en 1945 pour sanctionner les criminels nazis et en finir à jamais avec la barbarie. Pourtant, depuis, massacres et génocides n'ont pas cessé. Et nous vivons dans un monde où le pouvoir réclame toujours plus de désordre pour imposer sa protection mafieuse, plus d'inhumanité pour donner du brillant au mensonge humanitaire, plus de violences pour préserver l'intérêt des affaires. Dans ce monde, que peut signifier la justice ? C'est à ce paradoxe insupportable que Raoul Vaneigem s'attaque dans ce livre, en revisitant les fondements de la justice moderne. Pour lui, tant que la liberté restera le produit idéologique du libre-échange, la justice se bornera à corriger l'homme, valeur marchande plus que valeur humaine. Car si le capitalisme et l'humanisme de façade ont rompu avec la vengeance et la loi du talion, le rôle de la justice se borne depuis à limiter les excès d'un système inhumain. Pour autant, le pardon n'est pas une alternative à la punition : loin de rendre les hommes meilleurs, il les endurcit dans l'idée de la fatalité et de la compassion. Ni pardon ni talion : à la fois nécessaires et insuffisantes, les institutions judiciaires ne peuvent être que le point de départ d'une lutte plus vaste contre la barbarie universelle, fondée sur un consensus sur les droits de l'être humain, patiemment obtenu par une éducation nouvelle et l'émergence d'un nouveau style de vie : agir localement avec une perspective globale, en solidarisant partout les forces vives des individus aspirant au bonheur. Vaneigem ne raille pas les avancées de la justice, il plaide seulement pour que, poussées toujours plus avant, le progrès humain les rende obsolètes.