Soldats allant de champ de bataille en champ de bataille, émigrés, diplomates, cardinaux et courtisans passant de capitale en capitale,
administrateurs, marchands et savants ou encore pèlerins et curieux : au tournant des XVIIIe et XIXe siècles, les routes d'Europe sont pleines
de voyageurs. De part et d'autre de la ligne de faille que dessinent les événements traumatiques de 1814-181S, ils manifestent et incarnent les
bouleversements politiques et sociaux et du temps. Ils en sont les phénomènes - des phénomènes qui n'ont de sens qu'à l'échelle de l'Europe
entière. C'est pour les décrire et les comprendre que vingt-cinq historiens, représentant huit nationalités et travaillant sur l'ensemble de l'espace
européen ont été réunis dans cet ouvrage, avec une double ambition. D'une part, il s'agit de retrouver, par-delà la rupture née de la fin de
l'Empire français et de ces "french wars" qui révolutionnèrent l'Europe, l'unité d'une période : celle qui, des lendemains de la Révolution
française à ceux des différentes Restaurations, vit s'inaugurer la modernité politique et culturelle du continent. D'autre part, il s'agit de
considérer le fait social qu'est le voyage comme un poste d'observation privilégié du territoire de l'historien. Les pratiques qui le caractérisent,
les discours qui le prennent pour objet engagent en effet plus que lui-même. Les mutations que ceux-ci subirent, entre 1790 et 1840, redoublent
et expliquent ainsi, en partie, ceux d'une époque fondatrice pour les temps actuels.