Haru et Izumi sont deux frères très liés depuis l'enfance. Haru est issu d'un viol subi par sa mère, mais les parents n'ont jamais caché cette réalité aux enfants et la famille est restée soudée autour de ce drame. Izumi travaille pour une société de tests génétiques, tandis que Haru passe ses journées à nettoyer les tags de la ville. Quand d'étranges incendies se mettent à éclater ici et là, annoncés par de mystérieux graffitis, les deux frères décident de mener l'enquête. Les signes mis bout à bout forment un rébus dont ils s'efforcent de percer le sens.
Au-delà d'une énigme policière aux péripéties étonnantes, c'est la personnalité attachante des deux frères qui captive, ainsi que le charme des dialogues entre humour et émotion, émaillés d'interrogations sur le bien, le mal, et les questions éthiques posées par les progrès de la science.
Extrait :
«Le printemps est tombé du premier étage.» Quand je dis ça, la plupart du temps, les gens grimacent. Persuadés que j'essaie d'inventer des métaphores originales pour me rendre intéressant, ils critiquent ma façon pompeuse de m'exprimer. Ou alors ils me regardent d'un air apitoyé et m'expliquent : «Tu sais, les saisons, ça ne tombe pas tout à coup du ciel.» «Printemps», en fait, c'est le prénom de mon frère cadet : c'est Haru, mon frère, qui est tombé du premier étage, et non pas haru, la saison où les pétales de cerisier flottent au fil des rivières. Haru est né deux ans après moi. Le 8 avril 1973, pile le jour où Pablo Picasso est mort d'un oedème pulmonaire aigu. Quand il est né, j'étais sûrement fou de joie. Je ne m'en souviens pas, bien sûr, mais c'était certainement le cas. En tout cas, je ne pouvais avoir conscience des tourments de mes parents, ni de la raison pour laquelle leur entourage les regardait avec une telle froideur. Et donc, Haru, mon petit frère, c'est dix-sept ans plus tard, quand il était lycéen, qu'il est tombé du premier étage. Moi, à l'époque, j'étais étudiant. Ce jour-là, je traînassais sans rien faire à la maison quand le téléphone a sonné. C'était en fin d'après-midi, vers six heures et demie, je crois.
«Frérot, j'ai quelque chose à te demander.»
C'était bien la première fois que je l'entendais me dire ça.
«Je voudrais que tu m'apportes un truc.
- Quoi donc ?
- La batte de Jordan.»
Je suis resté un instant décontenancé, soupçonneux même, après quoi j'ai remonté le cours de mes souvenirs et ça m'est revenu : «Ah oui, la batte de Jordan.»