Pourquoi l'abjection ? Pourquoi y a-t-il ce " quelque chose " qui n'est ni sujet ni objet, mais qui, sans cesse, revient, révulse, repousse, fascine ? Pourquoi de l'abject ? Ce n'est pas la névrose. On l'entrevoit dans la phobie, la psychose. Il s'agit d'une explosion que Freud a touchée mais peut-être aussi évitée, et que la psychanalyse, si elle veut aller plus loin que sa simple répétition, devrait être de plus en plus pressée d'entendre. Car l'histoire et la société nous l'imposent. Dans l'horreur. Les rites, les religions, l'art ne feraient-ils rien d'autre que de conjurer l'abjection ? D'où l'étrange révélation de la littérature : Dostoïevski, Lautréamont, Proust, Artaud et, de façon sans doute hypersymptomatique, Céline. Le voici maintenant cet habitant des frontières, sans identité, sans désir ni lieu propres, errant, égaré, douleur et rire mélangés, rôdeur écoeuré dans un monde immonde. C'est le sujet de l'abjection.