« La folie étant essentiellement une affaire de langage, la première chose que doit faire celui qui désire s'instruire de ses arcanes consiste évidemment à apprendre ses dialectes respectifs. Il est vrai que le langage des fous passe généralement pour rebutant, obscur, difficile et désorientant, ne serait-ce que par sa variété. Comment s'y retrouver, par exemple, lorsque dans un salon chacun vous interpelle de tous côtés, qui en schizophrène, qui en paranoïaque, qui en pervers ? On comprend que, malgré toute sa bonne volonté, l'interlocuteur le mieux disposé finisse par se lasser et abandonner la partie. Eh bien, nous vous affirmons qu'avec notre méthode, moyennant un minimum de patience et de régularité dans l'étude, le lecteur de La folie sans peine saura en quelques mois naviguer à l'aise dans cet océan linguistique déconcertant. Non seulement il saura parfaitement différencier les dialectes aussi différents que le paranoïaque ou le maniaco-dépressif, mais encore il saura lui-même s'exprimer très convenablement dans ces mêmes dialectes. Il saura ainsi non seulement comprendre les fous, mais encore leur parler. Tel est le but modeste, mais croyons-nous assez utile, que nous nous sommes proposé dans le présent ouvrage. »