Dans le nord-est de l'Ouganda, deux mille chasseurs nomades vivent affamés, depuis que, par décision gouvernementale, leur territoire de chasse est devenu parc national. Le caractère sacré de leur montagne rive ces hommes à des lieux qu'ils se refusent à abandonner, pour se convertir, sur des terres plus fertiles, en agriculteurs sédentaires : un territoire est aussi un lieu de vie spirituelle. Parfois, un rire violent secoue le corps famélique d'un vieillard trébuchant au bord d'un ravin, affamé, auquel on ravit, dans la bouche, une parcelle de nourriture, déclenche chez eux une folle gaieté.
Le rire des Iks a glacé le Britannique Colin Turnbull qui, durant une année, s'est obligé à regarder l'horrible. II fait le décompte des atrocités minant un peuple, jadis aimable et très organisé, aujourd'hui en survie.
Car c'est l'étonnant : malgré la famine, le choléra, les Iks sont toujours vivants. La cruauté serait-elle donc le seul moyen de survivre? Le " stress " renforcerait-il une société en dérive? Ces questions sont d'autant plus actuelles qu'en Afrique, des millions d'hommes vivent un drame identique : guerres civiles, déplacements forcés. Que penser ? Que faire ?