Ni par sa génération, ni par ses origines sociales, ni par son éducation intellectuelle, ni par ses idées et sa vision du monde, Jean Etienne Marie
Portalis (1746-1807) ne semblait devoir prendre part à la geste napoléonienne. C'est pourtant lui qui, peut-être, a bâti le plus solide de ce qu'ont
légué à la France le Consulat et l'Empire : le Concordat a ramené pour longtemps la paix religieuse et avec elle la paix intérieure ; le Code civil –
promulgué il y a tout juste deux siècles, en 1804 – a établi sur une France durement secouée par l'Histoire une législation uniforme, synthèse du
droit d'Ancien Régime et des idées nouvelles, sur laquelle repose toujours notre droit et qui a, depuis, inspiré les lois de dizaines de pays dans
le monde.
Juriste formé à l'ancienne – il a été avocat à Aix-en-Provence durant vingt-cinq ans –, philosophe (ses travaux de philosophie du droit sont
remarquables), homme de caractère loyal, désintéressé, généreux même en un temps où il fut si tentant de ne travailler qu'à son propre profit,
Portalis a contribué à laïciser la société française à travers le Code civil, tout en la rechristianisant par le Concordat et sa gestion à la tête du
ministère des Cultes. En faisant pour la première fois toute leur place dans la nation aux juifs et aux protestants, ce catholique patriote s'est
montré un authentique fils des Lumières.
Autant de traits et de titres de gloire qui justifient, en cette année de bicentenaire du Code civil, la publication d'une biographie fouillée et
attentive du plus grand juriste français moderne, homme de pensée et homme d'action.