" Il est impensable qu'un travail sérieux sur notre monde et son évolution puisse faire l'économie d'une réflexion sur la science. Il est donc d'autant plus curieux que le rôle, l'influence, la place de la science soient à ce point exclus des recherches mer,ées sur les causes mêmes du nazisme, comme si, l'espace d'une catastrophe, la science s'était cantonnée à n'être que la caisse de résonance de quelques médecins fous ou d'une poignée de savants dévoyés. Et pourtant le nazisme, système politique du xx0 siècle , a, bien sûr, dû compter avec la science : malgré une volonté initiale de négation , liée à un profond dédain idéologique , les tentatives de " nazifier" jusqu'au contenu même des sciences les plus "dures" se sont associées , dans la pratique , à l'exploitation de l'efficacité scientifique par la voie du développement technique.[ . ]
Au-delà des lâchetés individuelles, des petites ou grandes compromissions de la vie quotidienne qui ne permettent pas de distinguer les scientifiques des autres citoyens, c'est la science en tant que système qui est ici mise en cause. Que les justifications en soient la défense d'une corporation, la participation active à l'effort de guerre, la possibilité de profiter
" légalement" de conditions extraordinaires en vue du progrès des connaissances, ou encore l'exploitation de concepts directement liés à l'idéologie dominante, la science sort profondément compromise de l'épisode national-socialiste. A travers une meilleure connaissance de notre histoire récente, ce sont les causes profondes d'une telle compromission que ce livre vise à élucider. l..'.enjeu n'en est autre que les rapports entre la science et la démocratie. »