Bonjour,
J'ai adopté une petite Haïtienne dans le désastre du séisme. Elle est arrivée à trois ans, encore endeuillée de la vie qu'elle avait perdue, presque sans transition entre sa famille et moi, la nouvelle mère catastrophée, blanche de peur et de peau.
Parce que l'adoption est fragile et que nous n'avons choisi ni le moment ni les circonstances, les premiers mois ont été plus éprouvants qu'un atterrissage d'avion sans pneus. Une longue glissade à nous écorcher le ventre, le sien et le mien.
Je n'écris pas pour de vrai. Mais devant ses trois premières années de vie enfouies sous les ruines de son pays, j'ai voulu écrire des racines à ma fille. Devant le chaos tellement brutal de notre rencontre, j'ai voulu me justifier et comprendre, pour lui expliquer comment sa peine a réveillé la mienne. Et comment nous nous sommes apprivoisées.
Je n'écris pas pour de vrai, mais les mots m'ont toujours servi. Ils ont parlé dans mes silences, ont été glacés pour me défendre, brûlants pour aimer. S'ils ont parfois été faux dans ma bouche, ils ont toujours été vrais sur papier. Ce sont de vieux amis, et j'ai voulu qu'ils soient témoins d'une histoire d'adoption pas comme les autres.
Je suis la maman de ma fille, mon séisme haïtien.