Espagne 1808. Les troupes de Napoléon sont aux prises avec une guerre sans issue. Le point d'honneur espagnol, la xénophobie d'un peuple superstitieux fanatisé par les prédicateurs ont tôt fait de soulever le pays contre l'occupant. Trop peu nombreux pour assurer à la fois l'offensive et le contrôle des voies de communication, les régiments de l'envahisseur sont bientôt une proie rêvée pour les guérilleros embusqués dans les montagnes. L'un d'eux, alors que tout le Nord du pays se trouve dépourvu d'artillerie, parvient à mettre la main sur un canon géant, qu'il se propose de promener par monts et par vaux pour pilonner les colonnes françaises aux endroits les moins attendus. Il sera rejoint dans sa fantastique équipée par un officier espagnol d'origine irlandaise qui a dans le sang le don de l'insubordination — et un sens inné de la stratégie.
Mais ce roman couleur de sang et d'or nous décrit une guerre qui n'est pas qu'héroïque : une sale guerre même, où l'on passe par les armes des civils innocents, et où de franches canailles règlent leur compte dans l'ombre. Au siècle passé, on se plaisait à considérer la sauvagerie « barbare » à l'œuvre dans ce conflit comme une survivance des ténèbres médiévales. Et puis le siècle suivant apprit aux hommes que la barbarie en question était plutôt une valeur de l'avenir. Écrit en 1933, ce roman prend en effet avec le recul du temps, des accents bizarrement prémonitoires. Peut-être est-il temps de le relire — et d'y découvrir, mis à nu, des démons qui ressemblent beaucoup aux.