Cet ouvrage, publié en 1951 (trad. fr. : 1965), renferme les conférences qu'E.R. Dodds avait données à l'automne 1949 en tant que « Visiting Professor » à l'Université de Berkeley (Californie), qui avaient comme objet l'étude de l'irrationalité grecque ancienne dans toutes ses manifestations, ainsi que la place dans la culture grecque du rêve, de la transe, de la magie. Ce sont tous des sujets encore marginaux et marginalisés par la recherche à cette époque. Il se compose de 8 chapitres. Il est enrichi de deux appendices, articles publiés et remaniés. Le premier montre que le ménadisme des 'Bacchantes' correspond à des faits cultuels attestés par des inscriptions. Le second est une véritable histoire succincte de la théurgie, considérée dans son développement et ses méthodes.
L'auteur s'adressait là à un public plutôt occupé de psychologie et de sociologie. On pourrait craindre dès lors que l'helléniste ne s'y trouvât mal à l'aise. Il n'en est rien. Les préoccupations sociologiques s'allient ici à l'information la plus de l'érudit, bien connu par son édition des Bacchantes. Chaque chapitre est suivi de nombreuses pages de notes où on voit l'auteur merveilleusement au courant de ce qui se publie partout sur la qu'il traite. On ne peut en dire autant, on le sait, de tous les philologues. Et l'histoire des idées grecques gagne beaucoup à être confrontée avec les résultats actuels des sciences de l'homme. Il faut de plus en plus à ceux qui étudient les faits anciens - surtout les idées religieuses, les institutions sociales - une ampleur, une hauteur de vue, sans laquelle une saine interprétation n'est plus possible. Traiter synthétiquement de l'irrationnel était inédit alors. La synthèse va de pair avec une impressionnante sûreté du détail et, en 300 pages, elle offre, d'Homère à Proclus, les jalons essentiels, grâce auxquels le lecteur peut reconstituer, d'une façon plus profonde, tout le destin de l'hellénisme.