Il ne s'agit pas à proprement parler d'un roman, mais plutôt d'un long poème en prose, où s'exprime une sensualité teintée de ferveur, de contact avec la nature.
L'aspect romanesque du livre se trouve dans la thématique du voyage, dans l'existence de personnages emblématiques et surtout dans la reconstruction d'une vie hédoniste qui transgresse la morale traditionnelle.
Gide y développe le thème du rapport à la matière et aux éléments naturels, dans une ode à la fois lyrique et sensuelle. À travers l'�uvre transparaît un enthousiasme quasi-extatique pour la vie, faisant du texte une sorte d'évangile de l'éveil des sens ; en effet, il semble que la sensualité y fasse presque office de profession de foi, voire de nouvelle religion, tant on y sent de ferveur et d'émotion, notamment pour la terre, les récoltes, les fruits, tout ce qui est charnel et charnu, tout ce qui peut être foulé, palpé, humé� Le texte tout entier peut être considéré comme une véritable hymne à la libido sentiendi.
En filigrane, c'est aussi de sexualité qu'il s'agit, même si ce thème n'est pas vraiment évoqué de manière directe dans le livre. En ce sens, on peut interpréter l'�uvre comme une hyperbole sur le désir et sur l'érotisme, l'évocation des moissons et des « nourritures » ayant valeur de symbole du corps désiré. C'est, avant tout, un livre sur le désir, sur la soif, les objets évoqués servant de prétexte à l'expression de ce désir, souvent inextinguible, irrépressible, débordant, qui parvient à magnifier, à transcender le monde tout entier.