Je me suis approchée du miroir et j'y ai fait un petit rond, dans la buée, pour discerner mon oil. Dans la glace, un oil vert me dévisageait. Je me suis sentie paralyser. Intégralement. Cet organe injecté de sang qui ne m'appartenait pas clignait, comme pour m'inviter à découvrir la totalité du mirage. Un frisson m'a parcouru tout entière. Je ne pouvais pas m'empêcher de trembler en élevant de nouveau ma main vers le miroir. J'ai fermé les yeux et glissé ma paume sur l'ensemble de la surface froide et poisseuse en me mettant à compter dans ma tête. Un. Je priais pour revoir le visage d'une jeune fille aux yeux bleus, aux cheveux bruns, au nez et aux lèvres trop volumineux, au teint rougeaud. Deux. Je sentais le rebord du comptoir me compresser le ventre, à force d'être penchée vers l'avant.
Trois. Quatre. Je sentais une curieuse pulsation dans mon oil droit. C'était celui qui était remplacé par le globe à l'iris glauque strié de veines dans le miroir. Mon cour s'emballait, je sentais mes genoux fléchir. Cinq. À la seconde où j'ai ouvert mes yeux : une vision d'horreur. Dans un sursaut de panique, j'ai été projetée vers l'arrière. Debout, dans la glace, se tenait Élise, ma défunte amie.»