Avec Hérétiques, Moore bouleverse toute l'histoire des hérésies telle qu'elle était pensée depuis le XIXe siècle en montrant comment l'Église médiévale a criminalisé les nombreuses oppositions à une époque où s'est affirmée une « monarchie pontificale » absolue et centralisée, théocratique, fondée sur la séparation radicale des clercs et des laïcs et sur la soumission des seconds aux premiers. Les dissidences qui furent persécutées sous le nom d'hérésie étaient en réalité suscitées par des lectures intransigeantes des Évangiles et par le rejet des privilèges comme du pouvoir des clercs. Il s'agissait non pas de mouvements extérieurs au christianisme (par exemple liés au manichéisme, comme on l'a longtemps soutenu dans le cas des prétendus « cathares »), mais de contestations évangélistes et anti-cléricales, toujours liées à des tensions politiques et sociales. Dans le livre, abondamment commenté depuis sa sortie en 2012, Moore examine tous les épisodes d'hérésies survenus entre l'an mil et les premiers temps de l'Inquisition (v. 1250). Comme le contexte général de chaque épisode est examiné en profondeur dans toutes ses dimensions, il en ressort une relecture de l'histoire générale du Moyen Âge central en Occident.