Le Temps vert est un roman méridional, une oeuvre de jeunesse d'une fougueuse et naïve fraîcheur : Adrienne Verdier, la jeune narratrice, évoque avec bonheur sa première enfance dans une ferme de l'Aveyron, auprès de grands-parents rudes mais aimants. Puis vient le remariage de sa mère et le départ pour la ville (Béziers, puis Villefranche-du-Rouergue). L'opulence trompeuse des premiers temps fait place à la déchéance sociale, car le beau-père passe sa vie dans les cabarets et boit toutes les économies de la famille. Avec leur air emprunté et leur patois rocailleux, Adrienne et ses soeurs sont constamment en butte aux quolibets des autres enfants, mais ni la faim ni le mépris n'entameront la rage de vivre des trois petites montagnardes. La seule planche de salut pour Adrienne est l'école, le certificat d'études, puis le brevet, qui doit lui permettre de sortir de la misère. Mais au moment de rejoindre son premier poste d'institutrice, elle ressent comme un vide existentiel devant une profession qui l'oblige à paraître autre que ce qu'elle est. Sur le chemin du départ, perdue dans un champ, elle entend le puissant appel de la terre, et fidèle à ses origines paysannes, se jure de retourner dans le village qui l'a vue naître. Ce sera un départ vers l'inconnu.
L'écriture de ce roman où rien n'indique qu'il s'agisse d'une autobiographie - mais le récit d'Adrienne ressemble à s'y méprendre à une suite de souvenirs - est simple et dépouillée ; les épisodes racontés sont souvent douloureux, parfois très joyeux mais sans jamais d'emphase ni d'artifice. C'est le trajet d'une petite fille sage dont la vie est bousculée par la mort de son père et le remariage de sa mère, et dont la famille est confrontée plus d'une fois à la faim et à la misère.